Ni
une ni deux, elle avait repris sa voiture en direction de
l'université « La Tour ». Il y avait encore des zones
d'ombre, mais au fond d'elle même, elle savait. Nyls d'Atlantys
n'était pas mort – le 20 Octobre tout du moins – et si une
personne savait où le trouver, c'était certainement sa groupie
Suzanne Ebadi.
Cinq
heures de route plus les quatre qu'elle avait fait le matin même, ça
commençait à faire. Devant laisser son véhicule à l'entrée, la
petite marche forcée lui fit du bien. Seulement, une surprise
l'attendait de l'autre coté de la porte.
Jimmy
Phoenix, qu'elle s'appelait la surprise, et ce n'était ni le nouveau
petit copain, ni le colocataire de Suzanne. C'était son
sous-locataire. Pourquoi ? Parce-que la demoiselle prenait ses
cours par correspondance désormais.
Ah
bon !
Et
plus contrariant, il ne voulait pas donner l'adresse à laquelle il
envoyait ses chèques.
Léonor, qui avait dépassé depuis longtemps son seuil critique de patience,
ne passa pas par quatre chemins.
-
« Quand on retrouvera Suzanne nue dans un caniveau, c'est vers
vous que j'enverrai ses parents. Alors si vous voulez que je réserve
ce sort à quelqu'un d'autre, donnez-moi son adresse. »
Tout
à coup, il coopérait. Il entra chez lui pour griffonner les
coordonnées sur une feuille et la lui tendit.
Le
papier en main, elle déchanta. C'était une boîte postale.
Bon...
Je vais avoir besoin d'aide.
Sur
le retour, elle téléphona à un pirate informatique avec lequel
elle avait l'habitude de travailler. Ils procédaient ainsi :
elle lui laissait un message, lui transférait de l'argent par mandat
cash, il la recontactait quand il avait ce dont elle avait besoin, et
lui transférait la deuxième partie de ce qu'elle lui devait.
Une
fois chez elle, Léonor s'était mise à l'aise et avait parcouru ses
notes.
« « On sait déjà que Nyls n'est pas mort le 20 Octobre à 6h58, puisqu'il a acheté un billet de train à 11h54. Donc le type dans le caveau de la famille
d'Atlantys n'est pas Nyls... Mais pourtant sur les photos... Damien
des Plaines... Non ! C'était son père qui avait fait
l'autopsie. Donc le père des Plaines était forcément au courant de
la fuite de Nyls et... et cela l'arrangeait bien au vu de ce qu'il se
préparait dans le quartier... Mais au final, il est toujours vivant ? Où est-il ? Dans la baie de Belladonna ? Seul ? Avec Suzanne ? Est-ce-que sa vie est toujours en danger ? N'est-il pas dans l'intérêt de... De... Comment il s'appelle déjà... Ah oui ! Romin. N'est-il pas dans l'intérêt de Romin des Plaines que Nyls disparaisse pour de bon ? Aurait-il pu trahir Nyls ? En mettant Edouard Plènozas au cour..."
Elle
fut interrompue dans ses pensées par le tintement de la sonnette.
Papi
Victorien a eu du mal à se libérer aujourd'hui...
Son cœur manqua un battement en apercevant la silhouette sur le pas de sa porte. Comme sentant sa présence, Ryan tourna la tête dans sa direction. Elle voulut bouger, se cacher, mais resta figée. Sa gorge se serrait de plus en plus. Ils restèrent à se regarder en silence quelques instants, jusqu'à ce qu'elle réussisse à faire un pas en arrière.
Elle
fut alors prise de panique. Elle pesta contre le ciel, comme s'il
était responsable de la visite de Ryan, alors qu'elle n'était pas
du tout à son avantage, des crayons dans les cheveux et surtout...
Et surtout sa cicatrice à nue.
Elle
se précipita dans la salle de bain pour chercher quelque chose qui
la camouflerait. Elle ouvrit toutes les portes de placard dans la
salle de bain en balayant tout de la main. Lorsqu'elle tomba enfin
sur son fond de teint, elle le fixa une fraction de seconde avant de
le balancer rageusement contre le mur.
A
quoi ça sert BORDEL !
Se grattant nerveusement l'avant bras, elle se dirigea vers son interphone et ouvrit à
Ryan la porte du bas.
Pourquoi maintenant ? Pourquoi
maintenant ?! Pourquoi pas... dans un million d'années ?
Elle
entendit la porte se fermer, et les pas de Ryan dans les escaliers.
Lorsqu'elle l'aperçut, elle fit volte-face. Elle eut un haut le cœur
et porta les mains à son visage.
-
« Léonor ? Je suis venu aussi vite que j'ai pu... Dès que j'ai su... Tu vas bien ?» Demanda son invité nocturne
visiblement aussi bouleversé qu'elle.
-
« Je ne suis pas prête Ryan... » Répondit-elle d'une
voix vacillante.
-
« Pas prête pour quoi ? De quoi as-tu peur ? »
Il
s'était arrêté derrière elle, respectant le souhait de Léonor de
ne pas le regarder dans les yeux.
-
« De quoi as-tu peur Léonor ? De quoi as-tu peur ?» Répéta-t-il
doucement en se rapprochant, si bien que sa bouche effleura la nuque dégagée de sa femme.
Toujours
les mains sur ses yeux qui semblaient attaqués par de l'acide, elle tremblait de tout son corps. La voix de Ryan
le trahit de nouveau en brisant le dernier mot:
-
« Pourquoi tu as peur de moi ? »
Elle
savait qu'il mourrait d'envie de la prendre dans ses bras, mais il se
retenait.
-
« C'est mon visage... »Hoqueta-t-elle. « Mon
visage... Je ne veux pas que tu le vois... »
Il
se plaça alors devant elle. Surprise, elle poussa un petit cri et
appliqua davantage ses paumes contre son visage. Il lui attrapa alors doucement
les poignets, de ses grandes mains chaudes, posa un baiser sur ses
doigts et exerça une légère pression vers le bas. Sans vraiment le vouloir, elle se laissa aller sous
l'impulsion.
Le
visage à découvert, elle était à sa merci. Les yeux fermés, elle
redoutait le moment où elle affronterait son regard. Un regard empli
de pitié. Peut-être même de dégoût.
-
« Léo... Tu n'as rien à craindre... Il n'y a rien qui pourra
gâcher ta beauté à mes yeux. »
Il
m'a appelée Léo ?
« Léo »,
c'était quand tout allait bien. « Léo », c'était quand
il ressentait de l'amour.
Alors,
elle desserra les paupières et laissa la lumière pénétrer dans
ses grands yeux verts. Ce qu'elle vit alors lui procura une vague de
soulagement.
Il
ne la voit pas... ma marque... Il me voit... Il me voit comme
avant...
Des
larmes perlèrent et elle ne tenta pas de les retenir.
Elle
ferma les yeux à nouveau, mais de bonheur cette fois. Elle porta
sa main gauche au contact de celle de Ryan qu'il glissa délicatement
sous son menton.
Il
posa un baiser du bout des lèvres sur sa bouche. Se faisant, il
réduisit la distance qui les séparait.
Léonor
posa alors sa main droite sur l'épaule de son mari, tandis que la
gauche allait à la rencontre de sa taille.
Une
fois au contact l'un de l'autre, il la pressa contre lui
et fit glisser ses lèvres le long de son cou, où il enfouit sa
tête.
-
« Tu ne sais pas ce que tu m'as fait subir Léonor... Plus
jamais. Plus jamais ça. »
Il
continua alors sa course jusqu'à la naissance de ses seins. N'y
tenant plus, elle lui prit le visage de ses deux mains et lui saisit la bouche de ses lèvres.
Le
baiser fut intense. Il la plaqua contre le mur et elle lui attrapa
les cheveux. Il passa une main sous son débardeur et elle lui mordit
l'oreille. Il la souleva et elle passa ses jambes autour de sa
taille. Ainsi, ils atterrirent sur le canapé.
Il
entreprit de déboutonner son jean, elle fit de même. Leurs souffles
saccadés trahissaient un désir qui les consumait depuis trop
longtemps. La connaissant par cœur, il n'eut aucun mal à libérer
la chevelure emprisonnée de sa femme pour y entremêler ses doigts.
Se faisant, il lui tira la tête en arrière et se plaça au dessus
d'elle.
Dans
la façon qu'il avait de la caresser, il y avait un sentiment de
revanche. L'ardeur qu'il y mettait avait quelque chose d'agressif.
Léonor n'était pas en reste, ne retenant pas ses doigts dans sa
chair et le mordant plus fort que de raison. Il protestait alors en
lui saisissant soit le poignet soit la gorge pour les embrasser
férocement.
Dans
leur lutte pour dominer l'autre dans le plaisir, ils tombèrent à
terre. Heureuse d'avoir l'avantage de la position, elle lui offrit un
sourire carnassier avant de remonter violemment son T-shirt pour
faire glisser ses lèvres du pubis au sternum se délectant au
passage des atouts athlétiques de sa proie. Rôle qui fut
inversé la seconde suivante. Ryan reprenant le contrôle en se redressant, ils se
retrouvèrent assis l'un en face de l'autre, et elle n'avait pas
terminé son hoquet de surprise qu'il lui avait glissé son débardeur
le long des bras, s'offrant ainsi d'office sa poitrine nue.
S’accommodant des entraves vestimentaires comme ils purent, ils
firent l'amour une première fois sur le tapis du salon.
Une
autre fois sur le lit qui subit des ébats moins querelleurs.
Une
autre fois sous la douche, où la douceur reprit ses droits.
Pas
un mot ne fut prononcé cette nuit là, leur énergie étant uniquement employée à se satisfaire l'un l'autre.
Au
petit matin, leur désir leur laissa un peu de répit et ils
trouvèrent quelques instants de repos. Léonor, avide de contact, se colla
entièrement au dos de Ryan lorsque ce dernier se tourna sur le coté pour
trouver une meilleure position. Surpris, heureux, il sourit et poussa
un soupir soulagé en reposant la tête sur l'oreiller. La jeune
femme, quant à elle, ne partageait pas ce moment de détente. Le front
blotti contre son mari, elle attendait. Elle attendait le moment où
le charme serait rompu. La respiration de plus en plus
régulière de Ryan fut interrompue par le sursaut qu'il eut à la
sonnerie du téléphone.
Résignée,
elle ferma les yeux et se dégagea de la douce chaleur qui émanait
du jeune homme. Surpris à nouveau, il demanda :
-
« Tu peux pas laisser sonner ?
-
« C'est important... » Répondit-elle en un murmure.
C'était le pirate informatique qui venait l'informer de ses découvertes. La boîte postale était au nom de Suzanne Ebadi, mais la domiciliation du contrat se situait chez une autre personne dont le nom était Carole Pomey. Elle nota le nom, l'adresse, et raccrocha.
Fébrile,
elle alla chercher ses affaires dans son placard, sous le regard
interrogateur de Ryan.
-
« Qu'est-ce-qu'il se passe Léo ?
-
« Je dois aller à SimCity.
-
« Maintenant ? »
Sans
donner de réponse, elle décrocha ses affaires, les enfila et se
dirigea vers la salle de bain.
Lorsqu'elle
réapparut, elle resta dans l'encadrement de la porte et posa une main
sur le chambranle.
-
« Je dois y aller. Je sais qu'on doit parler, mais... »
Les
larmes lui montèrent aux yeux.
Je
dois y aller, sinon je risque de manquer de courage...
Elle
n'eut pas le temps de reprendre. Il se redressa en un geste agacé et
dit :
-
« Eh bien vas-y Léonor. Vas-y, vu qu'il y a toujours plus
urgent que ce qu'il y a entre nous. »
Elle
pivota pour s'en aller, mais jeta un dernier regard avant que le lit
ne disparaisse de son champ de vision. La rage de Ryan lui hurlait de
rester, la sienne lui ordonnait de partir.
Les
jambes flageolantes, le cœur à cent à l'heure, son estomac qui
semblait vouloir à tout prix remonter dans sa gorge, chaque pas
était un calvaire. Mais pour Léonor Angès, il était décidé
depuis longtemps qu'on ne s'en prenait pas à elle impunément. Un
cri seul surpassait tous les autres, tous les maux : celui de la
vengeance.
Commentaires
Qu'est ce que ça changera de laisser courir 2h pour parler avec Ryan franchement ????
En attendant, ça fait pas a avancer le schmilblick tout ça !
Il est mort ou pas ? :p
Hum hum... *mystérieuse*
D'un coté je trouve que Léo aurait du rester avec Ryan et mettre sa rancoeur envers Plenozas et compagnie de coté pour une journée...
Mais de l'autre peut être que Nyls et Suzanne sont vraiment en danger de mort et qu'il n'y a donc pas une seconde à perdre pour les retrouver.
Mais moi et moi même ont est quand même d'accord pour dire que Léo aurait au moins pu expliquer l'urgence de la situation à Ryan, voire l'emmener avec elle. Alors que là elle s'enfuit, encore une fois, et le laisse en plan, encore une fois alors qu'il avait fait le premier pas, encore une fois.
Je suis trop divisée dans le dedans de moi et je voudrais une nouvelle maj tout de suite pour me décider, merci ! xD
Beh oui... Malheureusement, Léo se carapate. Encore.
Donc oui, Missing, dans un sens, tu as raison, il aurait pu prévenir. Mais je crois qu'il était trop heureux qu'elle ait fait un pas dans sa direction, et qu'il s'est un peu précipité. Donc oui, dans un monde idéal rempli de gens réfléchis et maîtres d'eux mêmes, il se serait assis à ses cotés, les mains chastement posées sur les siennes, et ils auraient parlé. Mais en réalité, il s'est passé ceci : il a appris que sa femme, qui avait failli mourir et qui le rejetait, avait tenté de le joindre, une première depuis des mois. Il fait quoi, l'amoureux ? Beh il fonce ! Et quand il la voit, toute fragile et désemparée, eh ben il a besoin de la prendre dans ses bras. Et une chose en entraînant une autre ben... Voilà ! Et donc, notre naif de Ryan, il y croit lui ! Alors il se méfie pas et ne lui met pas les menottes ! Grave erreur ! Hop, échappée la Léo.
Allez ! C'est bientôt fini... ;-)
Bon, par contre je comprends Léonor et son envie d'en terminer avec tout ça. Mais plutôt que de planter Ryan comme une patate dans un champ, elle aurait pu prendre 5min pour lui expliquer un minimum ! Parce que là, pas sûr qu'il soit encore là quand elle reviendra...
Encore un super chapitre ! :D
Alors si tu as choisi ton camp....
Mais je continue à croire que Ryan est quelqu'un de plutôt égoïste malgré tous les sacrifices qu'il a pu faire. On voit bien que c'était pas de gaieté de cœur :p