Meet... Corey 3






La période qui a suivi la rupture et l'adoption du "chaton" a été très compliquée pour Silvia.
Daniel était parti depuis plusieurs semaines et il donnait très peu de nouvelles. Mais je crois que le plus dur a été que lui n'en prenne pas. Je sentais qu'un fort sentiment de désillusion était en train de la gagner, lui enlevant petit à petit l'intérêt qu'elle portait à la vie. Elle allait de moins en moins en cours, passait son temps devant la télé et se nourrissait remplissait de tout, mais surtout de n'importe quoi.




Alors je passais souvent. Je m'occupais du courrier, de la nourriture, de lui faire rattraper ses devoirs. Je la couvrais à l'école, et j'ai eu d'ailleurs une aide assez inattendue de l'infirmière scolaire. 




Je l'impliquais dans mon processus de création, mes différents projets.
J'ai récolté beaucoup de "bof" , mais je n'ai pas lâché.



Tout ça a quand même fini par stopper sa chute libre, mais je sentais que c'était très fragile. 




Alors je me suis énervé. Je lui ai dit qu'il fallait qu'elle se fasse une raison, maintenant. Que son frère n'était pas celui qu'elle espérait, mais que ça ne devait pas gâcher sa vie. Qu'elle devait couper le cordon. 




Le contraste était déstabilisant. Je tremblais presque tandis qu'elle n'avait jamais été si apathique. Je me souviens avoir d'abord pensé que ce n'était peut-être pas le bon moment, puis ensuite que de toute façon, il n'y en avait jamais, et donc qu'il fallait bien se jeter à l'eau un jour.
C'est ce que j'ai fait.




-Il faut que tu arrêtes de te laisser abattre comme ça. Détache-toi de l'image que tu te faisais de ton frère et accepte ce qu'il est devenu. Tu es presque majeure. Tu as la chance d'avoir les capacités qu'il faut pour faire de grandes études et réussir ta vie.
-Les écoles demandent de l'argent, Corey.
-Et alors ? Tu crois être la seule à devoir travailler pour payer des frais de scolarité ? Il y en a plein ! Et il y en a qui sont tout seuls ! Toi tu n'es pas toute seule ! Je travaillerai aussi pour que tu puisses payer ton école.




-Corey... Tu as autre chose à faire de ton avenir que m'entretenir.
-Non.



-Non, Silvia. Tu te souviens, toi et moi, c'est à la vie à la mort. On a juré. Alors je vais pas te laisser tomber. Tu es...
-Miaou (Enfin un truc comme ça.) 



- Attends Rog Corey me parle. Tu disais ?
- Euh... Oui... tu es...
- MIAOUUUUU
- Tu es la personne la plus...
- MIAAAAAOOUUUU MIAAAAAOOUUUU
- Chut Rog j'entends rien... Répète ?
- Tu es la plus impo...
- MIAOU MIAOU MIAOU !
- Oh attends quand il est comme ça c'est sa litière qui est sale. C'est fou ce que tu peux faire caca quand même !







Corey du futur, tu peux attester que le faux chat est toujours là, mais je te jure que ça tient du miracle.


Bref.




La vie a repris son cours. J'étais chez elle à demeure, désormais. Je peaufinais mon projet secret, le seul que je n'avais pas partagé avec elle... 




Et elle remontait en selle.
On avait quasiment une vie de couple, à cette époque là. Sans... Sans tu sais quoi. Mais ça me convenait. On avait retrouvé notre complicité d'avant.




Après l'école, on rentrait directement. Et dès qu'elle partait au travail j'écrivais ma chanson.




J'y étais presque. A chaque fois que je lâchais mon stylo ou ma guitare, je faisais une promesse : rien, absolument rien ne m'empêcherait de la lui chanter. Toutes les bestioles du quartier pouvaient venir miauler en même temps, le monde pouvait s'écrouler : JE CHANTERAI MA CHANSON D'ABORD ! 




J'ai pas crié assez fort, je crois. Ou le cosmos m'ignore. Ou il n'y a que moi et ma poisse. 




Daniel avait fini par réapparaître, finalement, mais était visiblement trop occupé pour faire un saut à la maison chez lui. Du coup Silvia est allée le voir, bien décidée à lui dire sa façon de penser. 




Mais quand on est arrivés, mon cœur a commencé à s'affoler, sans que je ne sache pourquoi.
Et puis j'ai compris.




Mon oeil gauche avait repéré un ennemi à fort potentiel.




Daniel aussi a remarqué ce qu'il se passait, même tout absorbé qu'il était par sa conversation avec Jane.


Il y a juste eu un échange de regard.




Et j'ai compris que j'étais foutu.










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