Nadia 9.




L'instant d'après, il était debout et sortait du jacuzzi.


- « Tu sais quand les travaux vont se terminer à la bibliothèque ? Demanda-t-il en contemplant le chantier.
- « Ça change toutes les semaines. Mais qu'est-ce-que ça peut te faire ? Je t'y ai jamais vu... »
- « C'est pour que toi t'y retournes ! S'exclama-t-il faussement sérieux.
- « Ah mais moi j'l'aime bien mon nouveau spot !"


- « TON nouveau spot ?
- « Ouais ! Mon nouvooooooo WWHHHOOO.... »

Son pied venait de glisser sous elle, menaçant de la faire culbuter en arrière.



- « Whooooo....


- « Whoooo...


- « Ouf ! »

L'équilibre paraissait instable alors elle s'agrippa fortement à lui.


Puis encore un peu plus solidement, histoire d'être bien sûre de ne pas tomber.


Lui, très soucieux de ne pas la voir se fracasser le crâne contre le jacuzzi, resserra aussi son étreinte.


Cela dura-t-il des heures ? Quelques secondes ? Nadia n'en avait aucune idée. Et elle n'avait pas envie d'y réfléchir. Cela faisait-il longtemps qu'ils étaient ainsi, enlacés ?
Peut-être, car au bout d'un moment il dit :


- « Je crois que c'est bon... »


- « Hum hum... »

Mais doucement, déjà, il s'écartait puis faisait volte-face. 


Sans qu'elle n'ait eu le temps de dire « ouf » - une deuxième fois – il avait attrapé une serviette roulée sur un meuble, l'avait nouée autour de sa taille en un geste aisé et sortait.

Le cœur battant, étourdie, elle se précipita hors du box pour le voir dévaler les escaliers.




***




Résignée, elle s'était douchée, le moral en berne, se demandant ce qui avait bien pu se passer. Elle était tellement bien ! Avait-il été mal à l'aise ? Mais pourquoi ? Avait-elle été trop loin ? S'était-elle emballée ?

Perdue, elle s'était faite à l'idée qu'elle allait rentrer seule quand elle l'aperçut qui l'attendait. 


Comme devinant sa présence, il tourna la tête légèrement et dit doucement :

- « On y va... »


***


Le retour avait été silencieux car il ne semblait pas ouvert à la discussion. Alors qu'il lui disait « au revoir » avec retenue, elle dit :



- « Maintenant que tu es là, tu as bien 5 minutes pour ce fameux chapitre ? Et après promis je te laisse tranquille.
- « Calcuta, c'est pas...
- « T'embêtes pas Django. C'est juste idiot d'être à 3 mètres de mon cahier et de pas en profiter. Comme ça demain tu n'auras pas à m'attendre pour t'y mettre.
- « … Ok. »

Elle lui adressa un petit sourire et lui fit un signe de tête lui indiquant de la suivre.


Une fois à l'intérieur ils tombèrent sur les petites jumelles qui regardaient un programme sur la chaîne enfant.

- « Je t'attends là... ?
- « Oui oui. Si t'as pas peur de te faire kidnapper par une horde d'enfants... je sais même plus combien y'en a ici ! »


Comme pour appuyer ses paroles, la petite à la queue de cheval – Shanti ? Ina ? Lola ? - se tourna vers lui, les yeux émerveillés et dit :

- « Oh Fabien !! Tu viens regarder « Les princesses licornes » avec nous s'il te plaaaaîîîît ?
- « Euh... J'ai un truc à faire... »


- « Calcuta attends-moi ! »


Lorsqu'ils pénétrèrent dans sa chambre, l'adolescent ne put retenir une exclamation :

- « Eh ben...
- « Quoi ?
- « Nan rien... »

Elle haussa les épaules et se dirigea vers une pile de livres posée sur le sol.


Ne trouvant manifestement pas ce qu'elle cherchait, elle fit demi-tour pendant qu'il observait l'environnement de sa camarade.
Après avoir mis un bazar sans nom dans sa commode et avoir râlé à maintes reprises, elle retourna au premier tas de livres en passant par un second qu'elle n'avait pas vu avant.

- « Et sinon tu t'y retrouves comment dans tout ce bordel ?
- « Très bien !
- « Ça s'voit pas ! »


Lui continua son chemin vers la commode et s'amusa à farfouiller dans le désordre qu'elle avait posé dessus.

- « T'as de ces trucs dans ta commode toi... Oh... C'est quoi ça... »



Il avait trouvé un cadre qu'il avait retourné et posé contre le mur. Trop près des bougies à son goût, il faisait un peu de place tandis qu'elle arrivait.


Sur le coup, Nadia ne dit rien, soudainement pétrifiée. Elle sentait le regard de l’adolescent peser sur elle, lourd d'interrogation. Si lourd à supporter... Un instant, elle crut qu'elle allait exploser et lui crier dessus. Mais les visages bienheureux qui leurs souriaient lui coupa toute énergie et elle se contenta de souffler :

- « C'est mon frère. Et sa copine. »

Ses iris verts scrutateurs en demandaient plus. La jeune fille se demanda comment on pouvait poser autant de questions sans émettre un son.

- « Il l'a laissée quand il est parti. Il n'avait pas grand chose, mon frère. Et pourtant, il est parti sans sa photo. Il la regardait souvent, je le sais. Je sais pas pourquoi il ne l'a pas prise.
- « Ils sont toujours ensemble ?
- « Je ne sais pas. Je n'ai plus de nouvelles. J'imagine. Ils étaient très proches.
- « Ça fait longtemps qu'il est parti ? Il n'était déjà plus là je crois quand on est arrivés...
- « Non... 5 ans. Ça fait 5 ans.
- « Et lui et toi ? Vous étiez proches ? »

La question fit perler une larme au coin d'un de ses yeux et un goût amer, qui semblait guetter doucement, choisit ce moment pour envahir sa bouche. Et sa gorge, n'était-elle pas en train de gonfler dangereusement ? Ne risquait-elle pas d'étouffer d'un instant à l'autre ? Alors qu'elle allait se faire submerger par ses émotions, un contact doux, mais répété, la fit se concentrer sur sa main gauche. Non, ce n'était pas une impression, il frottait délicatement ses phalanges contre le dos de sa main.


Encore cette sensation vertigineuse de gouffre sans fond mêlée à ce puissant élan qu'elle ressentait pour son ami et qui lui réchauffait les entrailles dès qu'elle pensait à lui. Ramenée à elle, elle fut alors capable de passer outre son trouble et de répondre en prenant une grande inspiration :

- « Je le croyais. C'était tout, mon frère. C'était toute ma vie. C'était le seul qui comptait pour moi. Il avait cette façon de... »

Le désespoir, à nouveau. Elle renifla et poursuivit :

- « … de me parler... Il m'apaisait tout de suite. Je me sentais tellement en sécurité avec lui... »

L'émotion fut la plus forte, cette fois, et fit trembler ses mains et dégouliner des larmes qui avaient suffisamment menacé avant de jaillir à torrent. 

- « Je suis tellement perdue sans lui... Je... Comprends pas pourquoi il est parti. A 18 ans , PAF ! Il a disparu. »

Elle essuya ses yeux d'un geste rageur et ajouta d'une voix rauque :

- « Alors qu'il avait promis de ne jamais me laisser. »

Elle sentit à cet instant que la main de Django ne lui frôlait plus le dos de la main, mais sa paume.


Tout doucement, il entrelaça ses doigts aux siens.

- « Je suis désolé... Je suis tellement désolé...
- « T'y es pour rien... Dit-elle en répondant à son étreinte.
- « Nan... Mais je vois bien que t'as dégusté à mort toutes ces années et... je suis désolé que tu ais du vivre ça. Tout ça. Je ne remplacerai jamais ni ton frère ni tes parents, mais j'aimerais vraiment être là pour toi... »







C'est à cet instant qu'elle perdit le contrôle. 















Commentaires

Eulaline a dit…
Le bisou! :o Enfin :) Et j'espère tellement qu'il ne va pas la repousser, Django.
C'est encore un magnifique chapitre, plein d'émotion. J'en ai eu des frissons tout le long. Nadia parvient à s'exprimer, à se raconter avec ce jeune homme. Que fasse que tout ne s'écroule pas à nouveau pour elle au moment où elle parvient à communiquer, voire à aimer à nouveau. Je suis sur les charbons ardents et attends avec une telle impatience la suite. C'était magnifique. Bravo encore pour cette histoire avec laquelle tu nous transportes. :)
Missing a dit…
Et ben dis donc ... J'aurais préféré en savoir plus sur le monsieur, mais en cours de route je me suis perdu dans tes mots.
Je sais pas si c'est fait exprès, mais lire ce que dit Nadia a propos de son frère et lire tout ce qu'elle dit au garçon qui est à côté d'elle pour se rendre compte qu'il a probablement le même effet sur elle, je trouve ça tellement "beau". Elle a trouvé quelqu'un qui l'apaise, avec qui elle s'ouvre et avec qui elle a peur de faire une bêtise qui pourrait le repousser, mais elle ne s'en est pas encore vraiment rendu compte. Du moins consciemment. Parce que le bisou à la fin aurait tendant à me faire dire qu'elle a senti quelque chose.
Reste plus qu'à savoir où ça va les mener.
Et où ça va nous mener nous. Mais pour ça, va falloir qu'on patiente un peu, même si on aime pas ça !
GGO a dit…
Oui enfin ! Ce fichu bisou ! C'est vrai qu'avec des ados on a pas l'habitude d'attendre autant ! Mais nous avons deux handicapés émotionnels alors que veux-tu... --"
Roooo j'adore les frissons chez les lecteurs ^^
Merci beaucoup Pytisa, c'est un vrai bonheur de voir que je te touche, toi qui est si exigeante avec les mots que toi-même tu nous livres. <3
GGO a dit…
Eh oui c'est normal t'es un garçon ! Mais la chance que j'ai c'est que t'es pas non plus une brutasse donc je suis contente d'arriver à te toucher malgré un récit plus romanesque.
"Je sais pas si c'est fait exprès, mais lire ce que dit Nadia a propos de son frère et lire tout ce qu'elle dit au garçon qui est à côté d'elle pour se rendre compte qu'il a probablement le même effet sur elle"
Gardons ça pour la suite, j'attends un passage pour en reparler. Mais je peux déjà te dire que oui, c'est fait exprès (merci de l'avoir remarqué !! :*)
Merci merci <3
Marina a dit…
Ah ben finalement, je n'ai pas eu à trop attendre xD
Tu m'as toute remuée dans le dedans de moi même avec ce chapitre ♥♥♥♥
Ceci dit, je reste quand même sur mes gardes, il y a définitivement quelque chose de louche chez ce garçon, même si ça peut éventuellement être malgré lui. Je me laisserais envahir par la guimauve plus tard, quand tout le monde sera réuni et heureux, si ça ne te dérange pas :p
GGO a dit…
AAaaahhh comme je suis contente ^^ J'adore vous remuer.

Tu as raison, faut jamais s'emballer ! Donc n'hésite pas à reprendre une camomille si besoin XD

Merci merci de me suivre encore malgré ta retraite ! Ca me touche beaucoup !
Marina a dit…
Ah ben grotte ou pas grotte, pour rien au monde je louperais cette histoire. N'oublie pas que je l'ai attendue pendant 58 ans quand même ! xD
Pythonroux a dit…
Encore un super chapitre tout en émotion et notre petite Nadia qui se lâche avec Fabien ;)
Elle se livre presque complètement à lui, j'espère qu'il n'est pas méchant parce qu'il peut en faire ce qu'il veut maintenant...
GGO a dit…
Merci :-)